Et si on commençait par le commencement ?
L’Elevage
Tout comme pour les cultures végétales, c’est l’intervention humaine qui permet d’optimiser les ressources naturelles. Sans veau, pas de lait ! Mais sans l’intervention de l’homme, pas de lait de consommation non plus. Tout commence donc, dans un élevage, par une insémination naturelle ou artificielle. 9 mois après un joli petit veau pointe son museau tout rose. C’est ce qu’on appelle le vêlage qui a généralement lieu entre septembre et janvier. On le laisse têter entre 2 jours et 1 semaine (contre 8 mois dans la nature), juste le temps de lui assurer son apport en colostrum et anti-corps maternels, et d’activer la production lactée. A partir de là, la machine s’emballe. Le veau est retiré de sa mère, on lui donnera du lait en poudre réhydraté, ou une nourrice. Si jamais les veaux venaient à rester près de leur mère, un anneau dans le museau les empêchera de têter. Suite à quoi on traie la vache jusqu’à ce qu’elle n’ai plus de lait. Cette période de lactation dure environ 10 mois. La production de lait baisse en été. En Août, la plupart des vaches sont en fin de lactation et beaucoup sont taries (tout dépend du mode d’élevage et de l’éleveur). En principe, chaque vache cesse de produire pendant une quarantaine de jours mais aucune règle ne prévaut, même en BIO.
Puis on recommence : insémination, veau, traite.
La vache donne en moyenne naissance à 3 veaux dans sa vie, suite à quoi, impropre au vêlage et à la production laitière, on la retrouvera bien souvent dans nos assiettes. Il va sans dire que l’on parle « généralités » et que certains élevages ne laissent aucun répit aux animaux quand d’autres l’encouragent.
A noter que la production BIO allonge la durée d’allaitement direct à 8 jours. Ensuite, le petit séparé de sa mère, sera nourri au lait biologique naturel de préférence maternel (nourrice), liquide ou poudre, sans additif, pendant au moins 3 mois. Les jeunes sont regroupés entre eux afin de maximaliser les interactions sociales. C’est à leurs 2 ans, que les filles entreront en scène !
Donc, dans un élevage respectueux, il y a bien, comme pour les fruits et légumes, des saisons pour le lait !
Evolution des modes de production
En 1930, une vache peu sollicitée pouvait produire 5L/jour. Aujourd’hui, nous lui en demandons 45L. Soit une augmentation de 800% !
En 1930, un vache pouvait produire du lait en moyenne pendant 20 ans ; contre 8 aujourd’hui. 14 ans de moins…
« Mais que s’est-il passé au juste ? »
On a sélectionné des races de vaches prédisposées à la production laitière, comme les Holstein. Cette race est caractérisée par une grande taille, parfaite pour supporter des pis démesurément présents. Mais on l’a un peu aidée en améliorant son gabarit et la qualité de sa mamelle via des croisements génétiques. Elle sera désormais PARFAITE ! Nous ne sommes qu’en 1966…
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Puis, essentiellement aux Etats-Unis, on a stimulé la production de lait via quelques hormones de croissance. Il a fallu complémenter ces bêtes afin de leur apporter des forces, la seule verdure ne suffisant pas. Bref, on a avancé sans se poser de question, sans analyser les dangers potentiels. Si c’est facile et rentable, pourquoi revenir aux méthodes ancestrales ?
Il est important de noter que ces vaches sont plus souvent malades. Qu’à cela ne tienne, les antibiotiques sont automatiques !
L’Europe a quelque peu résisté aux hormones, mais la donne ne change pas grand-chose si l’on considère l’importation de nombreux produits transformés. Philadephia, vous connaissez ? Mais si, la crème à tartiner qui compose nos fameux cheesecakes… rassurez-vous, il y en a plein d’autres !
C’est bien beau de pointer du doigt ces pratiques mais regardons de plus près ce qui se passe dans nos élevages Français.
Beaucoup d’élevages encore nourrissent leurs bêtes avec des quantités phénoménales d’ensilages (foin fermenté), même en bio. Les vaches le digèrent mal, relarguent encore plus de méthane (gaz polluant à effet de serre), leur foie en pâtit. Parole de producteur ! Les grosses laitières sont cirrhosées. Sans compter les farines de soja, sous-produits, peut-être eux-mêmes cultivés avec des pesticides…Culture > Alimentation > Vache > Lait > Consommateur. CQFD. La boucle est bouclée !
Entre vaches cirrhosées, « vaches folles » etc…, la France est devenue chauvine et méfiante. Le marketing n’a pas tardé à dégainer son arme séduction : cartes géographiques, photos de producteurs. Pour nous apaiser et nous SATISFAIRE, ils ont lancé le « Lait de chez nous ». Vous les reconnaissez ? Qu’est ce que j’ai pu en acheter !
On a même le yaourt « au lait de nos éleveurs ». Là, ça a longtemps fait rire mon entourage. C’est le lait de l’éleveur ou de la vache ? Haha.
Bon bref, c’est drôle, sympa, local. Mais alors qu’est ce qui cloche ?
La cloche c’est nous. Les géants de l’industrie laitière françaises nous ont bien sonnés !
Ces industriels sont organisés en Coopératives auxquelles adhèrent les producteurs laitiers. Les responsables fixent les prix, et les conditions en contrepartie de quoi, les éleveurs sont assurés de vendre l’intégralité de leur production. Bon parti, n’est-ce pas ?
Alors pourquoi une crise laitière aurait-elle lieu d’exister avec des coopératives industrielles qui représentent la majorité de la production laitière Française ? Comment expliquer la baisse du cours du lait alors que les ventes augmentent ? Comment expliquer que les éleveurs ne puissent pas rembourser leurs lourds investissements matériels censés accroitre leurs rendements ? Comment transformer un agriculteur-paysan en agriculteur-industriel ? Comment les tordre jusqu’au cou(t) ?
Le Bio, la solution ?
Le Bio reste une valeur plus sûre que le « conventionnel » mais il reste aussi à modérer. Comme vous en avez-eu un aperçu plus haut. Il y a Bio et Bio. Tout dépend de l’éthique de l’éleveur, sans compter qu’on trouve de plus en plus de Bio industriel.
Un bel exemple de greenwashing > La marque hein, pas la vache !
Les chartes biologiques européennes deviennent plus permissives afin de s’harmoniser entre-elles et regrouper le maximum d’adhérents. Cependant, le bien-être animal et l’autonomie sont mis en avant. Une vache laitière Bio fournit en moyenne 20 L de lait par jour. Mais qu’en est-il des conditions des éleveurs ? S’agit-il pour autant de petits élevages fermiers ? Il semblerait qu’on puisse être géant et faire du BIO.
Concernant le cahier des charges des producteurs de lait bio, en voila les grandes lignes.
-Les vaches pâturent sur minimum un demi-hectare chacune quand les conditions climatiques le permettent, le cas échéant leur étable de 6m2/tête est propre.
-En cas de maladies, l’éleveur privilégie les médecines douces, homéopathie et phytothérapie. Si des antibiotiques doivent par la force des choses lui être administrés, le lait ne pourra être vendu.
-L’alimentation est composée majoritairement d’herbe fraîche, de foin, d’ensilage non OGM ou pesticides dont 50% est produite par l’éleveur ou exploitations régionales BIO pour favoriser l’autonomie et le respect des sols. Il est accepté les aliments en cours de conversion BIO…
Vous l’avez vu, trop d’ensilage même Bio n’a rien de glorieux.
Un bon lait provient d’une bonne alimentation. Une alimentation à base d’herbe est un trésor surtout si elle regroupe plusieurs variétés : trèfle, plantain, féverole… Cette herbe est riche en acides gras polyinsaturés. C’est la diversité qui fait la qualité ! Souvent elle sera complémentée par un mélange granulé Bio de lin, lupin, féverole, 10% plus cher que les farines conventionnelles ou biologiques à base de soja et maïs. Au final, on obtient un lait, riche en omégas 3, MAIS avec une quantité de matière grasse sensiblement inférieure à la norme établie par les coopératives, soit 4 %. Résultat ? Ce lait sera acheté moins cher… Il représente environ 35% de la production biologique.
Même en Bio « industriel », on recherche la quantité à la qualité.
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Et nous, citoyen ?
Le positif, c’est qu’il semblerait que nous allions dans la bonne direction en nous tournant vers l’alimentation biologique. Cependant il n’y a pas assez de lait bio en France, qui représente moins de 2 % du lait commercialisé dans le pays. 1/3 du lait bio consommé en France vient des pays limitrophes. OUPS !!
Plus de 90% de la production laitière bio et non bio est distribuée via les filières industrielles, que nous avons vu, de qualité inférieure même en Bio. Seulement 10% provient de fermes indépendantes. N’est-ce pas eux que l’on souhaite encourager ? L’indépendance qualité ?
Et nous citoyen, nous savons que la vache, ce ruminant, est connu pour relarguer du méthane en grosse quantité, un gaz polluant à impact majeur sur l’effet de serre. Pour le coup, BIO ou pas même combat !
Aussi, il semble préférable de favoriser les laits BIO et locaux issus de petites exploitations. C’est bien notre folle consommation qui encourage ces cadences. Pensons aussi bien au « lait caché », qu’aux fromages et yaourts pour enfants aux os solides, qu’aux crèmes glacées, qu’à notre mozzarella-tomate-basilic estivale, que… Encore une fois, tout repose sur notre morale. Moins notre consommation de ces produits « plaisirs » sera, mieux notre corps, notre Terre, nos vaches, notre agriculture se porteront.
Des adresses de fermes Bio & Locales seront communiquées dans le prochain volet sur les produits laitiers.
MEMO
-Privilegions le lait bio de saison
-Privilegions les cooperatives locales
-Diminuons notre consommation en produits laitiers pour n’en garder que le plaisir